30.6.05

NON AUX JEUX OLYMFRIC NI ICI NI AILLEURS !

Pourquoi s'enthousiasmer pour une opération où s'affronteront des robots à la vague apparence humaine ?

La Mairie de Paris présente sa candidature aux Jeux olympiques de 2012 sous l'angle de l'amour. Et pourtant les événements sportifs se succèdent où les valeurs véhiculées sont la tricherie avec le dopage, la violence sur le terrain ou dans les tribunes, la haine de l'adversaire avec pour seul objectif de l'écraser...

Ceci en conformité avec les vraies idées de Coubertin occultées par les idéologues de l'institution sportive, qui disait " ... les JO sont une lutte rude, farouche, ne convenant qu'à des êtres rudes et farouches. Les entourer d'une atmosphère débilitante de conformisme sans passion ni excès, c'est les défigurer, leur enlever toute espèce de signification. Qu'on ne vienne pas parler de jeux accessibles aux femmes et aux adolescents, aux faibles pour tout dire. (...) Comment voudriez-vous que je répudie la célébration de la XIº Olympiade ? (Berlin 1936) Puisque aussi bien cette glorification du régime nazi a été le choc émotionnel qui a permis le développement qu'ils ont connu. "

Les faits n'enlèvent rien à la bonne image des Jeux olympiques qu'utilisent à leur profit les multinationales ou les politiciens. C'est en effet une caractéristique déjà ancienne que celle qui voit l'adhésion massive des populations à tel ou tel chef. Aujourd'hui, c'est une caractéristique du pouvoir que d'organiser l'adhésion des "citoyens" à un événement soi-disant bénéfique pour tous : "Franchement, qui peut être contre les JO à Paris ?" Obtenir le consensus devient l'objectif, et pour se faire l'absence de choix oblige au plébiscite c'est-à-dire à se soumettre au cadre imposé.

C'est bien sûr le cas de la candidature parisienne avec l'organisation possible des JO 2012. Chacun est sommé d'abandonner tout esprit critique sur les Jeux comme si on était en temps de guerre, où doit prévaloir l'union sacrée. Ainsi en est-il du consensus particulier qui tente de se monter autour de ces JO. Près de 50 000 pandores armés sont d'ores et déjà prévus pour les défendre : il n'est même pas besoin de se demander si l'on pourra penser et vivre librement à Paris à l'ombre de cette
"fête".

Notre opposition aux JO n'obéit pas à la fausse critique poujadiste qui se contente de grogner contre les nuisances : impôts, bruit, odeur... où on veut continuer à vivre sa "vie" étriquée pour qu'elle ne change surtout pas. Ce qui est scandaleux, ce n'est pas tant le coût d'un projet censé concerner tout le monde, ni même qu'une minorité veuille imposer son projet à la majorité. Le scandale est, que dans le même temps, la misère s'étend. Le prestige de la France ? Ce sont toujours les mêmes qui se l'arrogent au détriment de la majorité ; ce prestige sert de paravent à leurs profits divers mais toujours juteux.

La création des emplois ? Un jour, on spécule à la cour de Delanoë : 60 000 a emplois. Un autre, c'est 42 000. Que ne ferait-on pas pour vendre aux Français ces Jeux ! Dans le langage du pouvoir il s'agit d'une "étude économique" : tout ça ressemble beaucoup plus à de l'intox ! C'est plutôt l'exploitation qui va progresser : combien de morts d'ouvriers a-t-on pu recenser sur les chantiers athéniens ? Que sont devenus les sans-papiers qui ont construit le stade de France ? Car rien n'est dit sur la nature de ces emplois qui ressembleront beaucoup plus à de l'esclavage moderne. On se rappelle des milliers de "stadiers" ayant travaillé gratuitement pendant la Coupe du Monde 98.

La préservation du consensus nécessite de taire cette information, de porter le débat (ou le consensus) ailleurs... Mais, parmi les souteneurs de cet édifice olympique figurent des entreprises qui ne sont pas réputées pour leur correction vis à vis de leurs salariés. La logique du profit et de l'exploitation qui anime ce spectacle constitue aussi la raison de notre refus. Lagardère déclarait recemment que "Pierre de Coubertin avait tort quand il disait que l'important c'est de participer, l'important c'est de gagner." On voit bien que pour eux, en sport comme en affaire, seul le profit compte.

Enfin, l'organisateur de cet événement, le Comité International Olympique, connaît une filiation politique par ses membres qui ne laisse pas place au doute : il s'agit d'une clique d'aristocrates, avec des présidents tous issus des classes aisées, qui agit sans se soucier le moins du monde d'une quelconque "démocratie". Sa pratique – corruption maffieuse, liens avec des régimes dictatoriaux comme la Chine – et son idéologie – le règne du toujours plus, la hiérarchie, l'ordre – représentent les véritables "valeurs" de l'olympisme.

Mais, en affirmant qu'il y a consensus – avec l'appui des médias, des campagnes de pubs... –, la critique de ces Jeux est écartée d'un revers de main : rien d'autre ne peut plus être pensé. Comment peut-on croire malgré tout que les JO 2012, s'ils ont lieu ici, seront "éthiques" : respectueux de l'environnement et représentant un modèle du genre humain ?

Nous refusons ces mensonges. Ce que nous refusons ici est aussi valable ailleurs : l'olympisme est une idéologie pernicieuse qu'il est nécessaire de combattre avec la plus grande énergie si l'on veut voir disparaître le règne de la lutte de tous contre tous.

Venez protester contre la candidature de la ville de Paris au Jeux olympiques de 2012 :
Rdv à 14h00, le SAMEDI 2 JUILLET
devant le COMITÉ
NATIONAL OLYMPIQUE ET SPORTIF FRANÇAIS
1 avenue Pierre de Coubertin
75013 Paris (RER cité Universitaire)

1.4.05

"DU MACDO DANS LES JO" (Les Inrockuptibles, 23 mars 2005)

Tout le monde n'a pas l’olympique attitude. Face au matraquage de Paris 2012, quelque irréductibles disent non merci.

« A l’intérieur de la mairie, les JO, cela relève de l'obsession, sans doute parce que Delanoë pense que ce serait un bon tremplin pour la présidentielle. On ne peut pas pousser une porte sans en entendre parler, ni ouvrir un placard sans se prendre des cartes "Paris 2012" sur le nez. »

Cette monomanie rapportée par un élu Vert n'a pas seulement saisi le maire de Paris. « L’olympique attitude », chère à notre ministre des sports Jean-François Lamour, est partout, dam les transports, sur les édifices les plus symboliques de la capitale, et même dans les manifestations.

Le 20 mars les syndicats ont défilé pour les 35 heures, les salaires et l'emploi en arborant drapeaux, pin's et T-shirts proclamant leur « amour des jeux ». Le secrétaire général de la CFDT, François Cherèque, avait même proposé de modifier la date du rassemblement pour ne pas donner une mauvaise image de la ville au Comité international olympique (CIO) en visite ce Jour là. La CFTC, de son coté, a demandé à ses adhérents de préférer la grève à la manifestation de rue, histoire, selon son président Jacques Voisin, de ne prendre aucun risque". Et. vraisemblablement, de ne pas s'aliéner les 87% de Français favorables à la candidature de la
capitale (1).

Au milieu de cette union sacrée, des irréductibles veulent pourtant faire entendre leur voix. Ils disent non à la candidature de Paris. Premier argument, le moins virulent : elle refléterait « ultra-centralisation » française, comme le relève Sylvain Garel conseiller vert à la mairie de Paris, pour qui "Paris n'est pas la ville de France qui a le plus besoin d'infrastructures sportives". L'économiste Bernard Maris : « C'est encore une fois la capitale qui va toucher le jackpot. Mats si les retombées sont aussi formidables qu'on nous ledit, pourquoi ne pas organiser les Jeux à Lyon, Marseille ou Bordeaux ? ».

Sauf que le « jackpot » annoncé est lui-même sujet à caution. Une étude affirme que l'impact direct des Jeux, pendant la période de préparation, serait de 6 milliards d'euros ? Bernard Maris rappelle qu'il faut mettre
en parallèle les 8,5 milliards d'investissements initiaux : « Au final, ça fait peu non ?» Le même document promet 60000 emplois ?

L'Oncle Bernard de Charlie Hebdo balaie d'une pichenette : « Ce seront en grande partie des boulots précaires : vigiles, vendeurs de billets… Tout ça étalé sur sept ans. En considérant l'investissement de 8,5 milliards, ça fait un peu cher l'emploi. » Quand les partisans du oui avancent que le tourisme grimpera en flèche, même scepticisme. A suivre Jean-François Bourg, chercheur au Centre de droit et d'économie du sport, la saison 2012 en cas de JO à Paris ne sera pas aussi prodigieuse qu'imaginé : « En période de grand événement type JO, beaucoup de gens préfèrent remettre leur voyage à plus tard, parce qu'ils savent que la ville sera saturée."

Lors des derniers JO, tous les sites grecs en dehors d'Athènes ont vu baisser leur fréquentation de 25 à 60 %. Pour l'économiste, de toute façon, "d'un point de vue scientifique », les raisons économiques des pro-Jeux
n'ont pas une grande valeur. Les hypothétiques gains sont 'surdimensionnés' parce que l'on oublie que 'les investissements sont publics, et les retombées, privées".

Et à ses yeux le débat de fond se situe là : « Quel est le véritable statut des JO ? Est-ce bien de les socialiser, quand les grands bénéficiaires des retombées, par exemple les télévisions, ne redistribuent
pas ?"

Du coup, pour lui. "la légitimité des JO ne doit pas seulement s'apprécier d'un point de vue économique, mais en fonction de leur utilité sociale ». Il le rappelle : si les objectifs sont tenus et que Paris ne connaît pas une augmentation de impôts due aux Jeux. « cela signifiera que cet argent existe. Alors pourquoi le placer là plutôt que dans des structures sociales fit même, renchérit Charlotte Nenner conseillère verte à la Mairie de Paris, pourquoi attendre les JO pour 'faire les travaux promis'', comme le» logements sociaux qui succéderont au village olympique des Batignolles, la couverture du périphérique ou encore la prolongation
du tramway ?

Sylvain Garel poursuit : « Vous sommes une municipalité de gauche. Notre objectif ne devrait pas être ta candidature de Paris aux JO, mais la lutte contre les inégalités sociales, pour le recul de la pollution et des habitats insalubres."

Autre point de friction : cette "municipalité de gauche" s’affiche en toute occasion aux cotés du "Club des entreprises", mené par Arnaud Lagardère pour soutenir la candidature de la ville. Soit dix-sept grosses entreprises comme Lagardère, donc, mais aussi Accenture, VediorBis, Suez, Bouygues… Pas exactement des bienfaitrices de l'humanité, qui s'offrent à peu de frais, une campagne de communication efficace en soutenant une cause consensuelle.

Moquant la volonté martelée par Bertrand Delanoë d'accueillir des "Jeux éthiques et solidaires", le groupe alternatif et rigolard de "L'Eglise de la très sainte consommation" a récité une "prière" de remerciements aux sponsors, le 12 mars lors d'"alter- JO" tenus devant l'Hôtel de Ville. « Pour des Jeux éthiques, un marchand de canons un escroc de l'eau, un pollueur nucléaire des complices de la France-afrique, des pollueurs notoires. Ô Sponsors, vendeurs de soupe. Merci de renforcer l'idéal sportif !"

A côté des débats sur l'utilisation de l'argent public. les tenants du non s'inquiètent des répercussions de l'organisation des JO sur la ville: six ans de travaux les inquiètent et un élu vert du XVII affirme que dans son
arrondissement, le rue André Suares située au coeur du futur village olympique, pourrait être déclarée plus ou moins morte en cas de Jeux : « Il est question d'envoyer pendant trois semaines l'ensemble de ses
habitants en vacances ».

Il y a aussi les arguments écologiques : "A quoi va servir ta construction d'un dôme a Roland-Garros dans le bois de Boulogne, au détriment d'un des seuls espaces verts parisiens ?, se demande Charlotte Nenner, en chœur avec les riverains et l'ensemble des opposants.

Même les efforts faits pour des Jeux écologiquement viables ne soulèvent pas l'enthousiasme : l'association des Amis de la Terre a été sollicitée pour l'établissement d'une charte de développement durable pour "Paris 2012". Elle a décliné. Son directeur, Patrick Teil, déplore le caractère "non contraignant" de cette charte vis-à-vis des entreprises partenaires, et relève la problématique soulevée par la présence dans "le Club des entreprises" de Suez, "contre lequel nous nous battons en permanence".

De son côté, Sylvain Garel note que si les futures infrastructures en cas de victoires sont "pour le moment", envisagées comme devant répondre aux normes de la Haute qualité environnementale (HQE). Leur construction, "à marche forcée", « devra tenir les délais très serrés. Du coup ces belles déclarations finiront probablement par passer à la trappe."

Les arguments contre Paris 2012 recoupent largement une opposition aux Jeux olympiques, même ailleurs. Si Charlotte Nenner a signé avec Sylvain Garel et Bernard Maris une tribune « Des Jeux à Paris, Non, merci… » (2), la conseillère verte explique qu'elle aurait. aussi bien pu s'appeler "Ni ici. ni ailleurs". Même ambiance chez Valérie et Martin. Simples citoyens affiliés nulle part ils ont créé un site Internet (3) pour lancer un grand
« NOOOOON » téléchargeable en auto-collants. Le « matraquage » dû à la candidature de Paris, cette « propagande soviétique », les a certes "réveillés", mais ce sont bien "ces" Jeux qu'ils contestent. "La compétition à outrance au nom du sport est insupportable, explique Valérie. Elle reflète les valeurs d'une société ou le sport est sponsorisé par Coca et McDo. ». Ils arguent aussi de la corruption au sein du CI0. Cet été, un de ses membres a été pris en flagrant délit de négociations par la BBC.et un autre exclu pour des détournements de fonds.

D'accord avec tout cela, Sylvain Garel met également en avant ''la contradiction fondamentale entre l'écologie politique et la devise des JO » : la première vise à "économiser les ressources de la planète, dépenser moins d'énergie, aller moins loin", quand la seconde exhorte à aller plus vite, plus loin, plus fort". Et cela vaut aussi pour les hommes, selon Albert Jacquard, auteur de Halte aux Jeux (Stock) : « Ce qui me dérange, ce sont les podiums, cette société de palmarès. Et puis voyez ces sportifs de haut niveau : s'entraîner plus de six heures par jour mettre toutes ses forces dans un seul objectif, cela produit des désastres humains."

Mais. alors que le généticien attribue la responsabilité de ces dérives au sport de compétition, et pense en gros que d'autres jeux sont possibles, le sociologue Orléanais Michel Caillât conteste cette vision. Ani- mateur
du Mouvement critique du sport, il diffuse depuis février sur Internet une lettre anti-olympique mensuelle : "Personne n'a jamais lu la charte olympique. C'est pourtant une doctrine qu'il faut analyser et débattre" Et
si personne ne le fait, c'est peut-être à cause de la fonction qu'il attribue aux JO : 'Celle d'un mythe. Les identités collectives ont explosé, alors on essaie de les remplacer par des factices." Du pain et
des Jeux, l'histoire n'est pas nouvelle. ».

Anne Comte

(1) Selon un sondage du journal L’Equipe du 8 mars.
(2) Le Monde du 8 mars.
(3) http://mapage.noos.fr/paris-2012

10.3.05

Les anti-JO hier mercredi 9 mars 2004 au soir dans l'édition nationale du 19-20 de France 3


[STEPHANE LIPPERT]

  • (...) Atout important pour Paris par rapport à d'autres candidats, il bénéficie d'un large soutien populaire. Selon un sondage, 87 % des Français y sont favorables.
  • On les a souvent entendus, mais une petite minorité pense, au contraire, que les Jeux apporteront plus de désagréments que d'avantages.
  • Voici leurs arguments recueillis par Erwan LEMOINE
[ERWAN LEMOINE]
Un grand " non " aux JO à Paris pour ceux qui n'y voient qu'une débauche mercantile et ne supportent pas l'implication d'hommes d'affaires dans le dossier...

[THOMAS GUERET,
PRESIDENT ASSOCIATION " RESISTANCE A L'AGRESSION
PUBLICITAIRE]
Aujourd'hui, on a comme porte-parole pour la candidature aux Jeux olympiques Arnaud LAGARDERE, qui est un marchand de canons, et on veut nous faire croire que, lui, il va pousser des valeurs qui sont humanistes, qui sont celles du sport et celles de la fraternité entre les peuples. Moi, ça me paraît franchement choquant, voilà...

[ERWAN LEMOINE]
Certains économistes sont dubitatifs sur les arguments avancés par Bertrand DELANOË. Dans une interview accordée au PARISIEN, le maire de Paris assure qu'il n'y aura pas d'impôt supplémentaire et que les JO créeront 42 000 emplois. Des chiffres contestés par Bernard MARIS...

[BERNARD MARIS,
ECONOMISTE ET ECRIVAIN]

Pour un engagement qui va être à peu près de 10 milliards d'euros, ça fait cher l'emploi, en termes de retombées d'emplois. Ensuite, ce sera des emplois précaires, ce sera des distributeurs de billets, ce sera des vigiles, ça ne va pas être des ingénieurs informatiques ou très, très peu...

[ERWAN LEMOINE]
Certains élus de la majorité regrettent que le Conseil de Paris n'ait pas été consulté sur l'opportunité d'une candidature, loin d'être, à leurs yeux, essentielle...

[SYLVAIN GAREL,
CONSEILLER DE PARIS, LES VERTS]

II y a d'autres priorités, la lutte contre les inégalités, pour la réduction de la pollution automobile, pour résorber les problèmes d'habitat insalubre, les problèmes de logement, qui sont considérables, sont plus importantes que d'avoir ou pas les JO en 2012...

[ERWAN LEMOINE]
II existe un dernier groupe opposé non pas aux Jeux en eux-mêmes, mais à l'agrandissement de Roland Garros dans le bois de Boulogne, ce qui ferait disparaître 9 000 mètres carrés de surface boisée...

[FRANÇOIS DOUADY,
PRESIDENT COORDINATION POUR LA SAUVEGARDE BOIS DE
BOULOGNE]
Là, nous sommes à peu près à l'endroit exact de la construction de ce grand stade, le dôme. Donc, vous vous imaginez bien que toute cette zone boisée, les tennis ici que vous voyez, tout ceci va être rasé pour construire ce grand stade.

9.3.05

[Conseil de Paris] Le vote sur "fête des JO" repoussé à avril en raison de réticences de Verts (AFP, 8 mars 2005)


PARIS, 8 mars 2005 (AFP) - Une délibération sur le financement, à hauteur d'un million d'euros, d'une fête des Jeux Olympiques en juin à Paris, a été retirée de l'ordre du jour du Conseil de Paris mardi, en raison de réticences d'élus Verts, a-t-on appris à la mairie.

Le vote a été repoussé à la mi-avril "pour la sérénité de tout le monde", selon Christophe Caresche, adjoint (PS) chargé de l'organisation du Conseil.

La fête prévue pour le 5 juin, un mois avant le choix par le CIO de la ville olympique de 2012, visait, selon le projet de délibération, à montrer et renforcer l'adhésion des Parisiens à la candidature de leur ville.

Considérant que le maire PS de Paris Bertrand Delanoë "en fait trop" sur les Jeux olympiques, les Verts, dont beaucoup pensent que "c'est trop tôt", avaient décidé de s'abstenir.

Un de leurs élus, Sylvain Garel, devait expliquer mardi en séance que selon les Verts, il y a "assez d'argent dépensé dans cette affaire".

Pour René Dutrey, président du groupe municipal Vert, cette abstention cependant "ne remet pas en cause la position du groupe" qui, en octobre, avait voté la part de financement des Jeux par la ville.

Mais, ajoute-t-il, "on sera très vigilants sur tous les débordements qui pourraient intervenir".

M. Garel a expliqué le retrait de la délibération par le fait que "la mairie ne veut pas de vote non-consensuel sur les JO le jour même de l'arrivée de la commission du CIO".

Les Parisiens sont "submergés par une marée de propagande", "il n'est plus question que des JO, comme si tout ce qu'on faisait y était suspendu", "il y a une espèce d'hystérie", a dit M. Garel qui ne cache pas son hostilité à l'organisation des JO: "c'est un projet ultra-centralisateur pour un pays déjà centralisé", dit-il.

chc/cgd/or

6.3.05

Les JO à Paris 2012 ? Non merci !

Quelle grande cause mérite le soutien apparent de toute la classe politique et de tous les medias ? Qui mérite des drapeaux, des autocollants, des pin’s, mais aussi l’illumination des symboles de la démocratie que sont l’Hôtel de Ville et l’Assemblée nationale ? Qui mérite un affichage omniprésent, des galas, des émissions de télé et des comités de soutien... ?

Malheureusement ce n’est ni la lutte contre le réchauffement climatique, ni la lutte contre le sida, ni l’annulation de la dette du tiers-monde… Non il s’agit de cette grande foire du sport-spectacle, les Jeux Olympiques.

A quelques jours de la venue de la délégation du CIO, il est devenu tout à fait impossible de se déplacer dans la capitale sans voir un logo Paris JO 2012. Au mépris de la réglementation sur la publicité, les logos de la candidature parisienne et des entreprises sponsors s’étalent sur les grandes avenues de la capitale, y compris - et surtout - en zone de publicité interdite. On les retrouve absolument partout : dans le métro, dans les journaux, à la télévision, … et bientôt dans son lit, avec les photos de couple « spécial St Valentin » devant le logo Paris2012. L’overdose est proche.

La pression est encore plus forte sur le personnel de la Ville de Paris et les élus : avec le papier à en-tête et les enveloppes de la Ville systématiquement estampillés « JO », les arbres de Noël JO, les banderoles JO sur les Mairies d’arrondissement… L’annonce de la constitution libre et spontanée d’une « Association des Personnels des Administrations Parisiennes pour l'Obtention des Jeux organisés à Paris en 2012 » finit de créer un climat surréaliste rappelant la propagande digne de l’ex-URSS.

On peut se demander s’il est encore possible d’affirmer une opinion différente face à ce consensus forcé, à ce rouleau compresseur de la candidature qui n’a jamais fait l’objet d’un vrai débat politique et public. Celui-ci est pourtant nécessaire.

Car on pourrait croire qu’avec le bel unanimisme gauche – droite concernant la candidature de Paris pour les JO 2012, tout le monde est d’accord. En réalité, un vrai tabou rode autour du sport spectacle, au point que toute critique est vécue comme si on sifflait le drapeau tricolore.

Alors quoi, c’est ça la démocratie ? On se tait et on sourit aux caméras de télévision ? Seuls les Verts de l’Ile de France ont su réfléchir à la question, et, par un vote lors d’une assemblée générale (*) dénoncer les jeux olympiques modernes et par là même la candidature de Paris à l’organisation de l’édition 2012.

Certains voient dans cet évènement un grand mouvement populaire et joyeux, une occasion pour les peuples de se réunir, par-delà les guerres et les intolérances. Mais il faut savoir regarder au-delà des paillettes et de l’hystérie ambiante, aller dans les coulisses pour constater que les JO contemporains sont loin de l’esprit initial de l’antiquité ou même de celui qui a pu animer Pierre de Coubertin.

Il ne faut pas confondre le sport spectacle et le sport tout court, c'est-à-dire la pratique sportive : la plupart des spectateurs se retrouvent avachis devant leurs postes de télévision, et il faut de grandes campagnes pour inciter les gens à marcher !

Si la pratique sportive amateur véhicule de hautes valeurs éthiques (fair-play, égalité…), le sport-spectacle des jeux olympiques modernes s’en éloignent franchement dans la réalité. En effet, la compétition sportive de haut niveau ne va plus sans dopage, corruption, tricherie et affaires.

Car les JO n'ont rien à voir avec le sport mais tout avec la compétition. Il y a bien longtemps que l'important n'est plus de participer mais de gagner. Et comme il faut gagner à tout prix, le dopage est partout. Pendant que les athlètes des pays pauvres se font prendre la main dans le pot de confiture, ceux des pays riches échappent aux contrôles. Aux dernières nouvelles, on nous prépare des OGM (Olympiens Génétiquement Modifiés). Mais peut-être sont-ils déjà là ?

De même, le nationalisme exacerbé lors des JO est totalement contradictoire avec notre volonté de dépassement des frontières dans un cadre européen, puis mondial.

Le respect des droits de l’homme ne constitue pas un critère de choix pour le CIO. Les JO de Pékin en 2008 se dérouleront dans un pays qui exécute des milliers de personnes, occupe le Tibet, et où la liberté se paye très cher.
La pression internationale autour des Jeux d’Athènes en 2004, a poussé la municipalité dans une politique ultra-sécuritaire quasi paranoïaque, avec son cortège de « nettoyages » et de restriction des libertés.

L’organisation même des JO modernes pose un problème démocratique : le pouvoir immense du CIO favorise la corruption. Récemment encore, un des membres de cet auguste organisme s’est fait prendre la main dans le sac par un journaliste de la BBC, celui-ci se faisant passer pour un homme d’affaire anglais voulant « encourager » la candidature de Londres, avec une belle mallette de billets !

Il est vrai que les JO, c’est d’abord une affaire de gros sous. C’est une très grosse industrie qui brasse des milliards, qui nécessite des investissements lourds. Déjà 24 millions d’euros seront dépensés pour le seul dossier de candidature de Paris ! Celui-ci, approuvé en conseil de Paris le 19 octobre 2004, comprend une garantie financière de la ville de Paris qui s’élève à près de 2 milliards d’euros, soit 1000 euros par Parisien.

Les investissements sont donc à la charge de la Ville, de l’Etat ou de la Région. Alors que les bénéfices démentiels générés par les droits TV ne vont jamais aux collectivités. Ce tour de passe-passe fait que les Villes organisatrices peuvent se retrouver lourdement endettées, voire carrément ruinées, et ceci pour un profit maximum du CIO et des multinationales sponsors. Pour une collectivité, organiser les JO n’est pas automatiquement une opération rentable : elle assure une bonne notoriété à la Ville et c’est tout. L’organisation des grands évènements sportifs suit d’ailleurs un modèle économique ultra-libéral, où les investissements sont pris en charge par la collectivité et les bénéfices sont privatisés, ceci souvent dans la plus grande opacité.

Oui, les JO modernes sont les JO de l’argent roi. Ces vingt dernières années, la place des multinationales sponsors n’a cessé de grandir, pour devenir très envahissante. Les logos et la publicité sont partout. Ces sponsors d’ailleurs imposés sont très loin du commerce équitable et des valeurs sportives : mal-bouffe, vêtements fabriqués dans des pays aux salaires minables… Croire qu’on pourra y échapper relève de la vraie naïveté. Il suffit de lire la liste des premiers sponsors de la candidature de Paris : un marchand d'armes, un exploitant de centrales nucléaires, un distributeur d’eau au passé sulfureux… Que des bienfaiteurs de l'humanité !

Certains brandissent l’argument de la création d’emplois. Mais les emplois qu’on nous fait miroiter concerneront essentiellement l’industrie du sport et du tourisme, et seront pour la plupart de précaires ou délocalisés. Nous préférerions que ces emplois soient créés pour satisfaire les besoins de la population, dans le domaine de la petite enfance, l’aide aux personnes âgées, l’environnement… Mais il est vrai que ces secteurs génèrent peu de profits publicitaires !

Les pros de la communication prétendent que les jeux olympiques seront « écolos ». Mais tels qu’ils sont actuellement conçus, les JO seront tout sauf « écolos », car outre l’éloge de la compétition et du nationalisme, les JO font partie des laboratoires du capitalisme sauvage.

De surcroît, le choix de Paris est assez problématique. A l'heure de la décentralisation, une fois de plus, c'est Paris qui est censée représenter la France. Même pour les thuriféraires des JO, la question du choix de Paris se pose. Paris a-t-elle besoin de touristes en plus ? Elle est déjà la ville la plus visitée au monde, son prestige international n'est pas à construire. Paris a t-elle besoin d'équipements de grande envergure supplémentaires ? Nous tombons encore dans le centralisme. Soutenir la candidature d'une autre ville française (de "province" comme on aime à dire dans notre beau pays jacobin) aurait eu à la limite plus de sens. Et il serait encore plus socialement et écologiquement responsable d’utiliser les droits TV et l’argent des sponsors pour organiser des JO dans une métropole d’Afrique ou d’Asie dépourvue d’infrastructures sportives.

Mais surtout, l’organisation des JO ne doit pas remplacer une politique municipale. Nous craignons déjà que Paris n’axe l’essentiel de sa politique municipale autour de l’organisation des jeux olympiques, alors qu’il y a bien d’autres priorités : lutter contre les inégalités sociales, faire reculer la pollution ou résorber l’habitat insalubre…

L’héritage pour Paris, ce sera un vélodrome et quelques stades en plus. Un bétonnage de toute la zone des Batignolles pour créer le village olympique. Certes, nous aurons la prolongation du tramway autour de Paris et une extension des espaces verts, mais il est triste de penser qu’il faudra attendre des années supplémentaires pour faire aboutir ces projets si nous n’avons pas "les Jeux". Les légitimes ambitions de changer Paris ne devraient pas être conditionnées par une décision que prendra le Comité International Olympique l’été prochain.


Charlotte Nenner, conseillère de Paris
Sylvain Garel, conseiller de Paris
Bernard Maris, économiste
Luc Bastard, militant des Verts,
membre de Verts-Economie.net

Claire Olivier, militante des Verts